Voilà 13,7 milliards d’années se produisait l’évènement fondateur de notre univers : le Big Bang. Cette théorie du Big Bang n’est pas une vérité absolue ; c’est un scénario et probablement le meilleur scénario actuel pour expliquer la création de l’univers. Ce scénario se nomme Le Modèle standard. Mais de quoi s’agit t-il exactement ? Ce n’est pas exactement une explosion, comme on peut l’entendre parfois. Déroulons ensemble ce scénario.
Sommaire
L’instant primordial.
Imaginez un lieu plus petit qu’une tête d’épingle. Imaginez un instant initial, plus rapide qu’un battement de cil. Imaginez qu’en ce lieu, qu’en cet instant, l’espace, le temps, la lumière et l’énergie sont indissociablement mêlés. En ce point primordial, tous les modèles mathématiques s’affolent et toutes les mesures tendent vers l’infini. C’est un point asymptotique , une « singularité » où toutes les certitudes vacillent. Difficile à imaginer n’est ce pas ? Normal. A t-il même seulement existé ?
L’inflation.
Soudain, le point primordial entame une dilatation ultra-violente. A l’instar d’un ballon de baudruche gonflé soudainement, l’espace se met à grossir à une vitesse dépassant l’entendement, bien plus rapide que celle de la lumière. C’est ce qu’on appelle l’inflation. L’Univers n’est alors constitué que d’énergie pure. La température s’élève à des milliards de milliards de degrés. C’est chaud. La densité est des milliards de fois supérieure à celle du plomb. La lumière elle même ne peut pas encore circuler avec une telle densité. Si nous avions assisté au Big Bang, nous n’aurions rien vu !
Matière et anti-matière.
En un clin d’œil l’inflation s’arrête. Désormais, l’Univers va poursuivre son expansion, mais de manière beaucoup plus lente. La température de l’Univers est alors si brulante que l’énergie engendre la matière et l’anti-matière. Mais à peine nés, matière et anti-matière s’anéantissent mutuellement et retournent à l’état d’énergie. Pourtant, sans qu’on sache réellement pourquoi, la matière fini par l’emporter. Les plus petits constituants de la matière font leur apparition : les quarks, les électrons, les neutrinos. On note aussi, l’apparition de particules d’interactions : les photons, les bosons, les gluons. C’est bientôt un véritable « zoo » de particules que l’on retrouve dans notre soupe primordiale. A ce moment, les quarks tentent bien de s’assembler, mais rien n’est encore possible : les températures sont encore trop fortes. Le quark ne travaille pas quand il fait trop chaud, c’est bien connu.
Apparition de l’Hydrogène.
Notre Univers est maintenant âgé d’une seconde. Toujours opaque et très dense, il poursuit son expansion. La température et la densité vont chuter progressivement. A force de persévérance, les quarks se liant entre eux vont réussir à créer des neutrons et des protons. Un proton isolé est déjà un élément chimique : l’hydrogène. Le premier élément chimique est né ! La plus grande réserve d’hydrogène de tout l’univers est en passe d’être constituée.
La nucléosynthèse.
L’univers est maintenant âgé de 3 minutes. La température baisse toujours et par combinaison de protons et de neutrons, de nouveaux types de noyaux atomiques font leur apparition : le deutérium (la combinaison instable d’un proton et 2 neutrons), l’hélium (2 protons et 2 neutrons) et un soupçon de lithium (3 protons et 3 neutrons). Essentielle, cette nucléosynthèse prépare l’hydrogène et l’hélium qui seront le combustible des futures étoiles. Les électrons continuent de circuler librement en tout sens. C’est toujours une belle pagaille dans notre soupe primordiale ! Les photons sont toujours bloqués par cette énorme densité. Toujours aucune lumière à l’horizon.
Et la lumière fût !
Vers 380.000 ans après le Big Bang, l’Univers poursuit son expansion. La température à considérablement chuté ; il ne fait plus « que » 4000 °K. Une des grandes forces qui gouvernent l’univers peut enfin se manifester : la force électromagnétique. Celle-ci se charge gentiment d’expliquer aux électrons (de charge négative) qu’ils n’ont pas à circuler en tout sens mais qu’ils doivent tourner autour des noyaux atomiques (de charge positive). Cette action « nettoie » le ciel qui devient transparent et fait place nette aux photons qui peuvent filer librement à travers l’espace. La lumière se propage enfin.
L’image de ces premiers instants de l’Univers a pu être photographiée par satellite. C’est ce qu’on appelle le fond cosmologique diffus (photos ci-dessous). En effet, puisque la lumière met un certain temps à nous parvenir, observer très loin dans l’espace profond revient à remonter le temps pour visualiser une image vieille de 13 milliards d’années qui vient à notre rencontre.
Entrée en scène de la gravité.
Le structure du fond cosmologique diffus nous révèle que le brouillard d’hydrogène et d’hélium composant l’univers n’est déjà plus homogène. Une autre force universelle jusqu’ici peu active vient d’entrer en scène : la gravitation. Elle provoque des perturbations dans ce brouillard et déclenche la formation de grumeaux et de filaments. Ces grands amas de matière donneront bien plus tard naissance à des galaxies primordiales. A l’inverse entre ces amas, les premiers grands espaces vides font leur apparition.
Formation des premières étoiles.
On suppose que 100 à 200 millions d’années après les Big Bang, les premières galaxies et les premières étoiles se sont créées. Par un phénomène dit d’accrétion, un nuage va entrer en rotation sous l’effet de la gravité. Puis il va s’aplatir pour former un disque avec un bulbe central et enfin former un astre sphérique chaud qui deviendra une étoile. Des milliards d’étoiles voient le jour en même temps. Les galaxies primordiales fusionnent ou entre en collision. Le grand spectacle des galaxies se met en place.
La naissance du carbone et de l’oxygène.
Au sein des étoiles se déroule alors un évènement capital. Les atomes d’hydrogène et d’hélium sont tellement comprimés que la fusion nucléaire voit le jour. Elle provoque l’apparition de nouveaux éléments chimiques dont le carbone, l’oxygène et même des atomes plus lourds comme le fer. A la mort de ces étoiles primordiales, l’hydrogènes, l’hélium et tous leurs éléments chimiques lourds se répandent dans l’espace. Cette matière servira à la formation d’autres étoiles comme notre Soleil. Toujours par accrétion, des nuages riches en éléments lourds créeront des cortèges de planètes autour des étoiles.
Un scénario parfait ?
Ce scénario, bien qu’ayant ses détracteurs emporte aujourd’hui l’adhésion de la très grande majorité des scientifiques. Il n’est pourtant pas sans défaut. Un « détail » notamment : le modèle mathématique prévoit dans l’Univers une quantité de matière bien plus importante que ce que nos téléscopes sont parvenus à observer. En fait 95% de la matière manque a l’appel ! Par ailleurs des galaxies entières ne devraient pas avoir pu se former : les quantités de matière qu’elles contiennent sont bien trop faibles pour que la gravité ai pu les empêcher de se disloquer. Par obligation les scientifiques ont introduit un concept : la matière noire. Bien que jamais observée, cette matière noire invisible représenterait toute la matière manquante de l’Univers.
Autre fait troublant ; alors que l’expansion de l’univers devrait aller en ralentissant, les télescopes et satellites de mesure ont constaté que cette expansion allait en accélérant ! La seule solution pour intégrer cette accélération dans le modèle standard est d’introduire une énergie sombre ou énergie noire bien mystérieuse. C’est son caractère répulsif qui éloignerait les galaxies les unes des autres et accélèrerait l’expansion de l’Univers. Seul problème : on n’a aucune idée de ce qu’elle pourrait être !
La recherche est donc plus active que jamais. Le LHC, le gigantesque accélérateur de particules, apportera peut être des pistes de réflexion. D’autres chercheurs travaillent sur d’autres scénarios, notamment le modèle avec rebond (aussi appelé Big Bang – Big Crunch), imagine un univers, qui arrivé à son expansion maximale se contracterait sur lui même sous l’effet de sa gravité et s’écroulerait en un point primordial pour repartir à nouveau dans une nouvelle expansion.
La théories des cordes à également vu le jour ces dernières années. Très élégante, elle conçoit les particules comme cordes, plutôt que des points, dont les différentes fréquence de vibrations correspondent aux différents types de particules de l’Univers.
Nous sommes des poussières d’étoiles.
L’évolution de notre planète Terre a par bonheur vu la vie apparaitre. Ne perdons pas de vue que cette vie est constituée des éléments chimiques de base forgés lors du Big Bang et aux cœurs des étoiles. Chez un être humain on retrouve 7 milliards de milliards de milliards d’atomes. La recette cosmique du corps humain nécessite :
- 9% d’atomes d’hydrogène tous issus du Big Bang et vieux de 13 milliards d’années. On les trouve dans l’eau de notre corps, dans les molécules organiques (protides, lipides, glucides) … donc partout.
- 65% d’atomes d’oxygène issus des étoiles donc ayant entre 13 et 4 milliards d’années. On les rencontre, dans l’eau corporelle, les molécules organiques, les muscles, etc.
- 18% d’atomes de carbone.
- et d’autres éléments tels l’azote (3%), le calcium (1%), le phosphore (1%), le potassium, le soufre, le sodium, le chlore, le magnésium, le fer et le manganèse.
La belle formule d’Hubert Reeves, Nous sommes tous des poussières d’étoiles, prend tout son sens.
Pour en savoir plus, je vous conseille l’excellent dossier du CNRS sur le Big Bang.
Et pour finir en vidéo, sur la théorie du Big Bang, une vidéo de présentation du LHC : le Large Hadron Collider, le plus grand appareil électronique jamais construit par l’homme :